La visite de John F. Kennedy en allemagne en 1945 

A la fin de juillet et au début d'août 1945, seulement quelques semaines après la fin de la guerre en Europe, John F. Kennedy, alors âgé de 28 ans, visita l'Allemagne dévastée par la guerre. Il était accompagné dans sa tournée par le Secrétaire américain à la Marine James Forrestal (dont le président Truman fit plus tard son premier Secrétaire à la Défense). 

Kennedy nota ses expériences et ses observations dans un journal qui fut rendu public il y a seulement quelques années; il fut publié sous le titre Prelude to Leadership: The European Diary of John F. Kennedy, Summer 1945; Washington DC, Regnery 1995 («Prélude au pouvoir: le journal européen de John F. Kennedy, été 1945»). 

Ces notes du journal montrent la grande curiosité et le sens du détail du jeune Kennedy -- des traits de caractère qui sont aussi manifestes dans ses deux livres à succès, While England Slept [Pendant que l'Angleterre dormait] (1940) et Profiles in Courage [Visages du courage]. Plus tôt en 1945, il avait assisté à la session d'ouverture de l'Organisation des Nations Unies à San Francisco, et avait visité la Grande-Bretagne pour suivre la campagne pour les élections parlementaires, couvrant les deux événements en tant que journaliste pour le groupe de presse Hearst.

A Berlin, Kennedy nota lors de son arrivée le 28 juillet: «La dévastation est complète. Unter den Linden [le boulevard] et les rues sont relativement déblayées, mais il n'y a pas un seul immeuble qui ne soit pas dévasté. Dans certaines rues l'odeur -- douce et écoeurante des cadavres -- est envahissante». Pour la population de Berlin, rapporte-t-il, «la ration de base est de 1½ livre par jour -- approximativement 1200 calories (2000 étant le chiffre donné par les services de santé comme ration alimentaire normale -- la ration est seulement de 900 calories à Vienne)». 

Kennedy fait plusieurs allusions dans son journal à la férocité de l'occupation soviétique en Allemagne. «Les Russes entrèrent avec une telle violence au début -- démontant les usines et violant les femmes -- qu'ils s'aliénèrent les Allemands membres du Parti Communiste, qui avait une certaine influence dans les usines». 

«Le viol et le pillage» par les troupes soviétiques «était général», note aussi Kennedy. «Ce qu'ils ne prenaient pas, ils le détruisaient». A un autre endroit il note: «Les Russes ont joliment bien pillé le pays, ont vécu à ses dépens ... Les Russes ont pris tous les hommes et les femmes valides et les ont emmenés par bateau». 

Il prit aussi note de l'effet des attaques aériennes dévastatrices des Anglo-américains: «D'après nos experts navals, le bombardement de l'Allemagne ne parvint pas à stopper leur production, et la production s'accrût de 300% pendant la période 1942-44». Même jusqu'à la fin, nota aussi Kennedy, une distribution adéquate de nourriture fut assurée dans la capitale allemande: «L'approvisionnement à Berlin était extrêmement bien organisé, même pendant le blitz [bombardements] le plus sévère». 

Les Allemands ordinaires, dit-il à un autre endroit, «ne réalisaient pas ce qui se passait dans les camps de concentration». 

Kennedy et Forrestal visitèrent aussi Brême, un important centre industriel et commercial du nord de l'Allemagne, et une grande cité portuaire. Comme le nota Kennedy, les Russes n'étaient pas les seules forces d'occupation à se livrer au pillage à grande échelle en Allemagne: «Les Britanniques étaient entrés à Brême avant nous -- et tout le monde était unanime pour décrire le pillage et la destruction par les Britanniques, qui avaient été très sévères. Ils avaient pris tout ce qui avait un rapport avec la marine -- navires, petits bateaux, lubrifiants, machineries, etc». 

Il nota aussi le mauvais comportement des troupes américaines: «Les Américains pillèrent sévèrement la ville [de Brême] en arrivant», écrivit-il. «Les gens ne semblent pas réaliser», ajoutait-il, «à quel point ils ont eu de la chance d'échapper aux Russes. Pour ce qui est du pillage des maisons et des villes, cependant, les Britanniques et les Américains ont été très coupables». 

A Brême, écrivit Kennedy, la ration alimentaire des Allemands «est d'environ 1200 calories -- la nôtre est de 4000». En dépit de tout, «aucun des officiers et des hommes [américains] ici ne semble avoir de haine particulière pour les Allemands». 

Kennedy rencontra et discuta avec des responsables de la Marine américaine à Brême. Comme il avait été commandant d'un bateau-torpilleur dans le Pacifique -- le fameux PT-109 -- il avait un intérêt particulier pour l'équivalent allemand -- le Schnellboot ou E-boat (bateau rapide). Après avoir étudié la question en détail, Kennedy conclut que la version allemande était «bien supérieure à nos bateaux PT». 

La place de Hitler dans l'Histoire

Après Brême et Bremerhaven, Kennedy et Forrestal s'envolèrent pour la Bavière, où ils visitèrent la ville de Berchtesgaden et montèrent ensuite à la retraite montagnarde de Hitler, qui était « complètement dévastée, le résultat d'une attaque aérienne avec des bombes de 6,5 tonnes par la Royal Air Force dans une tentative de tuer Hitler ». Ensuite ils firent l'ascension jusqu'au « Nid d'Aigle » de Hitler, perché dans les montagnes. 

Juste après cette visite, Kennedy écrivit un commentaire remarquable dans son journal, daté du 1er août 1945, concernant Hitler et sa place dans l'histoire: 

Après avoir visité ces sites, vous pouvez facilement comprendre que dans quelques années Hitler émergera de la haine qui l'entoure aujourd'hui pour devenir l'un des personnages les plus marquants qui aient jamais vécu. 

Il avait des ambitions sans bornes pour son pays, ce qui faisait de lui une menace pour la paix du monde, mais il y avait un mystère autour de lui par la manière dont il vécut et mourut, qui vivra et grandira après lui. Il avait en lui l'étoffe de laquelle les légendes sont faites. 

Moins d'un an après cette tournée européenne, Kennedy fut élu au Congrès en tant que Représentant du Massachusetts, commençant une carrière politique qui le conduisit à la Maison Blanche, et qui se termina soudainement avec sa mort le 22 novembre 1963.

 

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